Lors du 78e Congrès de la FNTR hier à Montrouge (92), il a été question de transmissions et d’attractions du secteur du transport routier. Le secteur rajeunit comme l’a indiqué la Banque de France : 48% des entreprises ont moins de 8 ans. Mais le TRM s’inquiète des mesures fiscales à venir. François Durovray, ministre des transports, a tenté de rassurer les transporteurs en leur confirmant que la fin du remboursement de la TICPE ne figurait pas dans le projet du PLF 2025. Il a cependant indiqué à TRM24 que l’écotaxe fera partie des discussions de la conférence nationale du financement des mobilités en février prochain.
Le Congrès était placé sous le thème de la transmission : « Roulez jeunesse ». Alors que le secteur subit toujours une pénurie de main d’œuvre, il rajeunit. Selon les données de la Banque de France commentées lors du Congrès par Carine Jupin, directrice régionale des Hauts de France, 53% des entreprises de transport françaises ont moins de 8 ans (47% en 2019). Autre chiffre significatif : 35% des dirigeants ont moins de 40 ans. Ces jeunes entreprises se démarquent par un taux de valeur ajoutée plus élevé (pour celles de moins de 3 ans) (37,7% contre 36,2% pour l’ensemble des entreprises). « Cela s’explique principalement car elles ont moins de sous-traitance » a précisé la responsable de la BDF.
Le ministre des transports, François Durovray, s’est exprimé pour la première fois depuis sa nomination devant les transporteurs les gratifiant mais en les désignant comme les plus pollueurs : « nos sociétés ont besoin de davantage de mobilités. Vous avez deux avantages indéniables par rapport aux autres modes : votre souplesse et votre capillarité » a lancé le ministre de tutelle aux chefs d’entreprise présents au Congrès. Jouant la séduction, François Durovray a toutefois nuancé en indiquant : « la difficulté du TRM est qu’il est le plus carbonné [de tous les autres modes]. Les solutions techniques ne sont pas toutes là aujourd’hui. Elles ne sont pas uniques même si la solution de l’électrification semble celle qui sera majoritairement utilisée par les constructeurs et les transporteurs routiers à l’avenir » avant d’ajouter : « il faut aussi un environnement fiscal et un accompagnement financier. » Sur le premier point, le ministre a confirmé que le PLF 2025 prévoyait une continuation du remboursement de la TICPE. Sur le second, il a déclaré être favorable à poursuivre le dispositif d’aides dans les mois à venir après une première enveloppe de 130 millions d’euros pour financer l’achat de poids lourds électriques. « Aujourd’hui, sur les 6 milliards d’euros, seuls 6% des certificats d’économie d’énergie revient à la mobilité. Il faut qu’il y ait plus à l’avenir, aussi bien destiné au ferroviaire, au fluvial qu’au TRM » a souligné le ministre.
Saluant « la validité de l’essentiel du Paquet mobilité par le Conseil de justice de l’Union européenne qui a permis d’avoir un certain nombre de dispositions permettant de placer les entreprises françaises à égalité avec leurs concurrentes », le ministre a annoncé la mise en place rapide d’un groupe de travail sur le contrôle du droit du travail, les temps de travail ou les tonnages, afin de veiller à l’application des dispositions européennes du Paquet mobilité.
Le secteur du TRM inquiet
La nouvelle présidente de la FNTR, Florence Dupasquier, n’a pas caché sa préoccupation pour le secteur du transport routier : « c’est d’abord un message d’inquiétude que je dois délivrer notamment dans le cadre des débats budgétaires [] Il nous est demandé de faire des efforts. Les mesures présentées dans le projet de loi de finances (PLF) et dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) ne sont plus des efforts, ce sont de véritables tours de vis qui vont mettre en péril la vie d’entreprises déjà fragilisées. » La présidente a cité entre autres la révision du calcul des allégements des charges ou de la « quasi-annulation » de la déduction forfaitaire spécifique (DFS) (qui devrait disparaitre à court terme selon le nouveau PLF 2025), « le coût du travail va augmenter pour les entreprises sans pour autant cela bénéficie à nos salariés » a-t-elle ajouté.
La CEO de groupe Samat s’est dit prudente quant à l’avenir du dispositif du remboursement de la TICPE : « Certes, vous nous l’avez annoncé [s’adressant au ministre des transports], nous n’aurons pas de rabot de la ristourne de la TICPE en 2025. Mais il nous faut anticiper l’arrivée du dispositif ETS en 2027 qui va augmenter le coût du carburant. »
A relire : Florence Dupasquier succède à Jean-Christophe Pic à la présidence de la FNTR
Un non ferme à l’écotaxe
La présidente n’a pas hésité à interpeller le ministre sur les « écotaxes régionales » faisant référence à « l’instauration prochaine du R-Pass en Alsace. « Nous nous opposons fermement à cette nouvelle fiscalité qui va d’abord toucher les transporteurs nationaux et handicaper un peu plus leur compétitivité. D’autant que nous savons que d’autres régions [le Grand Est] ont manifesté leur intérêt » a déclaré Florence Dupasquier indiquant que le secteur ne souhaitait pas « revivre le mauvais feuilleton de l’écotaxe ». Elle a surtout rappelé que l’objectif de la mise en place d’une écotaxe ne pourrait pas être atteint : « on ne cesse de nous dire que cela permettrait le financement des infrastructures. Sauf que la directive eurovignette ne permet qu’une affectation de 15% de la recette vers la route. Le reste [85%] partant ailleurs. »
Interrogé par TRM24 sur l’écotaxe (qu’il n’a pas évoqué lors de son discours), François Durovray a apporté des précisions quant à des exonérations possibles : « il y a déjà la loi qui permet à des collectivités locales de créer un dispositif d’écotaxe. En tant que ministre des transports, j’ai vu que l’écotaxe allait être mise en place rapidement. J’ai indiqué que je souhaitais qu’il y ait des dispositifs d’exonération pour un certain nombre de professions qui pourraient être très impactées. Le président de la collectivité européenne d’Alsace a manifesté le souhait d’étendre ces exonérations et je suis disponible pour que l’on puisse faire évoluer le cadre légal pour prendre en compte ces demandes » a-t-il souligné. Le ministre n’exclut pas d’intégrer des discussions concernant l’écotaxe lors la conférence nationale du financement de la mobilité en février prochain : « je ne vais pas brider les discussions. C’est ouvert. C’est le moment où on doit tout se dire. »
Un secteur de plus en plus fragilisé
Carine Jupin, directrice régionale des Hauts de France, a tenu à souligner le ralentissement du TRM : des créations d’entreprise en baisse après des années dynamiques (de 9,3% en 2022 à 7% en 2023), un taux de défaillance en hausse (de 2,1% en 2022 à 3% en 2023). Elle a préféré évoquer une « stabilité du secteur » : « les chiffres d’affaires des entreprises évoluent de seulement 0,8% en 2023. Cela est dû au ralentissement des autres secteurs, clients du TRM : la grande distribution ou encore le bâtiment. » Les marges, « nerfs de la guerre », sont particulièrement impactées. Le résultat courant avant impôt a perdu 0,8 point de CA en 2023. « 4 entreprises du secteur sur 10 ont été déficitaires en 2023. Un warning pour le secteur car la situation est proche de celle de 2008 lors de la crise économique » a indiqué Carine Jupin (16% en 2021, 19% en 2023). Les causes sont multiples : la revalorisation des salaires ou encore la baisse des aides à l’achat de véhicules « qui a eu une répercussion sur l’amortissement du matériel ».
Enfin, autre signe alarmant : les capacités des remboursements se dégradent, selon les données de la Banque de France, en particulier en raison des remboursements des PGE (Prêt Garanti par l’Etat) mis en place pendant la période COVID. « Quand on dépasse les 7 ans de remboursement, l’entreprise devient fragile. La baisse des marges entraîne un manque de cash et donc moins de trésorerie pour rembourser » a commenté Carine Jupin.
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