Actu

Analyse des marchés de l’énergie : Lost in tarification

C’est par cette référence cinématographique que l’IFP Energie Nouvelles entame son analyse des marchés de l’énergie au mois d’avril 2025. Les annonces douanières du mandat de Donald Trump et celles de relèvement des quotas de production de l’OPEP+ ont surpris les analystes provoquant une chute des cours du pétrole brut.

La crainte d’un conflit

Jérôme Sabathier, du département économie et évaluation environnementale à l’IFP Énergies Nouvelles, relève l’inquiétude des analystes sur l’économie mondiale. Avec un Brent à -13% sur la première semaine d’avril 2025 (à moins de 66US$/baril soit le niveau le plus bas depuis 2021), on peut parler d’une forte chute des cours. Selon ses termes : « les investisseurs craignent qu’une escalade vers une guerre commerciale mondiale ne freine la croissance économique ».

Outre les annonces de barrières douanières par l’administration américaine, un autre facteur s’y est ajouté : l’annonce par le cartel de producteurs OPEP+ d’un relèvement de ses quotas de production d’or noir avec un accroissement de 411 000barils/jour dès le mois de mai 2025. « Depuis ces annonces, plusieurs banques ont révisé à la baisse leurs prévisions pour les prix du pétrole cette année. UBS anticipe désormais un Brent à 72 $/b, soit une baisse de 3 $/b par rapport à ses précédentes estimations. Goldman Sachs prévoit un prix moyen de 69 $/b en 2025, tandis que les analystes de Morgan Stanley estiment que le Brent pourrait chuter à 67,50 $/b au second semestre. Par ailleurs, l’Arabie saoudite a annoncé une baisse de 2,30 $/b du prix de l’Arabian Light pour le mois de mai, la plus forte réduction depuis plus de deux ans » poursuit l’analyste.

Paradoxalement, pour les zones importatrices comme l’Europe, cela allège la charge du coût des importations d’énergies. Le gaz naturel ayant également connu une baisse sensible de ses cours sur les marchés spot (34.1€/MWh le 8 avril 2025). 

Une variante de qui perd gagne

Jérôme Sabathier confirme qu’il faudra plusieurs semaines pour « évaluer pleinement l’impact de ces nouvelles mesures ». Nul doute que les enjeux politiques, tant aux USA qu’en Arabie Saoudite sont déterminants. Selon lui, « il est probable que l’Arabie saoudite ait cherché délibérément à accentuer la pression baissière sur les prix afin de contraindre certains membres du groupe, comme le Kazakhstan et l’Irak, à respecter davantage leurs quotas de production ». La baisse des cours devenant dès lors une arme pour s’assurer de la discipline des membres du cartel.

Autre paradoxe que nous relevons : une telle baisse pourrait pénaliser … la production de pétroles et gaz non conventionnels américains (ceux-ci perdant en rentabilité dans un contexte de cours faibles). En Europe, les prix des carburants hors taxes ont paradoxalement été diversement orientés sur le hub Amsterdam Rotterdam Anvers : hausse pour les essences de +4.3% à la veille du passage aux spécifications été, et baisse du gazole à -2.2%. Dans ce contexte, les marges de raffinage en Europe restent stables et bien orientées à 7US$/baril « soit 6% au-dessus de la moyenne des cinq dernières années ».