Donald Trump, avec ses initiatives diplomatiques brutales, peut se targuer d’avoir réveillé les marchés pétroliers. Jérome Sabathier, directeur des évaluations économiques et environnementales à l’IFP Énergies Nouvelles, fait le point dans son Tableau de bord du 10 février 2025.
« Les guerres commerciales et les sanctions imposées à l’Iran et à la Russie créent une forte incertitude et une volatilité marquée sur le marché pétrolier ». Voilà l’entrée en matière de dire en lisant l’édition actualisée du Tableau de bord des marchés pétroliers rédigé par Jérome Sabathier. Si, sur la première semaine de février 2025, la tendance était à une légère détente par rapport à décembre 2024, le spécialiste note un regain de nervosité qui se traduit par d’importantes fluctuations des cours du pétrole brut au gré des annonces de Donald Trump et de son administration. Cela joue autant à la baisse (lorsque l’administration américaine menace d’une hausse des tarifs douaniers contre les importations en provenance du Canada ou du Mexique) qu’à la hausse (du fait de la réinstauration de sanctions contre l’Iran visant à bloquer ses exportations de pétrole -en particulier vers la Chine-).
Mais les Etats-Unis ne sont pas seuls en cause. L’analyse de l’IFP Énergies nouvelles relève que le cartel OPEP+ et son Joint Ministerial Monitoring Comiteee (JMMC ou comité ministériel conjoint de surveillance) ont modifié les sources externes chargées de suivre la production de ses membres. Exit Rystad Energy AS et l’Agence américaine d’information sur l’énergie (EIA). Trois autres cabinets de consultants ont été préférés par l’OPEP+ : Kpler, OilX et ESAI. Cela fait suite à la mise à l’écart de l’Agence Internationale de l’Énergie.
Le grand écart des prévisions
Ces choix politiques du JMMC ne sont pas neutres selon l’expert : « Ces nouveaux changements (…) pourraient créer davantage d’incertitudes sur les marchés et rendre l’analyse de la discipline de production du cartel encore plus difficile, alors que les incertitudes sur la demande de pétrole, notamment en Chine, persistent ». De fait, les estimations par les tiers deviennent difficiles : pour une même période, Reuters estime que l’a production des membres OPEP+ était inférieure à 61 000 barils/jour à leurs quotas tandis que Bloomberg estimait qu’elle dépassait ces mêmes plafonds de 364 000 b/j. Le flou est lié à la production des Emirats Arabes Unis, mais aussi de pays comme l’Irak, le Koweït ou l’Iran. L’Agence Internationale de l’Énergie estime qu’un excédent d’offre, de l’ordre de 750 000 b/j pourrait apparaître en ce début d’année.
Le renforcement des sanctions américaines, en particulier contre le transport maritime de pétrole, pourrait « impacter significativement » les revenus pétroliers de la Russie. Ce serait pas moins de 160 pétroliers qui auraient été identifiés. Cela « entraînant une hausse significative des coûts de transport et des délais de livraison vers l’Asie ». Par ricochet, cela contraindrait la Russie « à baisser le prix de vente de soin brut pour le faire repasser sous le seuil des 60$US/baril imposé par les sanctions internationales ». Les rétorsions contre les exportations iraniennes relèveraient davantage des rodomontades que de réelles sanctions : « la majorité des exportations iraniennes étant destinées à des acteurs indépendants et privés en Chine, peu exposés aux marchés financiers américains et peu préoccupés par les sanctions » relève Jérome Sabathier.
L’Europe paye plus cher
En Europe, la dépendance aux importations de produits énergétiques, en provenance du Moyen-Orient ou des USA, demeure. Le Tableau de bord de l’IFP Énergies nouvelles relève que les marges de raffinage sur le continent sont au plus haut (+28% à 7.7$US / baril). En janvier 2025, les prix de l’électricité sont revenus au plus haut niveau depuis mars 2023. Cela malgré une bonne production éolienne ou photovoltaïque (notamment en France, Espagne et Portugal). En France la moyenne sur janvier 2025 a été de 105,7€ / MWh. C’est encore plus élevé en Allemagne fédérale (118,5€/MWh). Même tendance pour le gaz naturel (contrats à terme du gaz TTF cotés à 48.7 €/MWh). La valeur du CO2 sur les bourses carbone est également remontée à un plus haut (78€ / tonne) comparable à novembre 2023. Cela promet des lendemains difficiles pour les entreprises avec l’extension des crédits carbone au transport routier en 2027 (SEQE-2 ou ETS-2 en anglais).
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